Dans un des salons de l'hôtel
Panorama de Cordoba (qui n'appartient pas à notre holding
économique) la «Fondation du 25 mars» a donné, le 26 mai
2003, une conférence de presse pour compléter l'information au
sujet de la fameuse résolution de la juge Cristina Garzon de Lascano
interdisant la fabrication et la vente de toutes les drogues contraceptives et
de tous les stérilets dans tout le territoire national, pour avoir au
moins partiellement plusieurs effets abortifs. A travers les nombreuses
«versions confuses» qu'avait fait circuler la presse en
général (même si certains médias ont traité le
thème avec impartialité ou, du moins, ont donné la parole
à la partie actrice de ce procès) on a même réussi
à affirmer que l'avocat général n'était en
réalité qu'une sorte d'imposteur. Après la
conférence aux différents médias, l'avocat et prêtre
Fernando Altamira nous a reçu en entretien particulier que nous avons
complété ensuite par d'autres contacts. C'est un homme de 32 ans,
même s'il en paraît moins. L'assurance dans ses déclarations
et la conviction avec laquelle il défend sa cause effacent tout doute sur
l'attachement qu'il portera à mener l'affaire jusqu'à ses
dernières
conséquences.
Panorama
Catolico Internacional :
Devons-nous
vous appeler Père ou Maître
?
Père Fernando Altamira :
Père. Il est plus important d'être prêtre
qu'avocat.
P.C.I. :
Alors vous êtes avocat
?
P.F.A. : Matricule
fédéral T 77F
0598.
P.C.I. : Vous
êtes entré au séminaire après votre admission au
barreau ?
P.F.A. : Non. Je
suis entré au séminaire en 1995 ; il me restait une seule
matière à passer : l’Histoire du Droit . Je l'ai eue et j'ai
donc été reçu en juillet 1996 et en décembre eu lieu
la remise des diplômes, j'y suis allé en soutane (un prêtre
doit toujours la porter à l'extérieur) ; et lorsque j'ai
prononcé mon discours, je l'ai fait bien fièrement en
«uniforme», mais non pas fier de ma petite personne, mais de ce que la
soutane représente : les nombreux saints prêtres que
l'Église a donné tout au long des
siècles.
P.C.I. :
Et vous n'avez jamais exercé
?
P.F.A. : Non. C'est mon
premier procès.
P.C.I.
: Qu'est ce que la «Fondation du 25 Mars»
?
P.F.A. : Bien, vous en avez
une petite idée puisque vous avez eu la gentillesse de publier une note
dans votre journal lors du
procès.
C'est une personne
juridique constituée à Cordoba pour travailler à la
défense de la famille et de la morale catholique, qui suppose la morale
naturelle même si elle la dépasse ; dans son objet nous avons mis :
«Défendre les biens et valeurs qui ont toujours été
défendus et enseignés par l'Église Catholique, le droit
naturel et la saine morale».
Nous
faisons ce procès et ce recours en grâce parce que nous croyons
qu'en Argentine les lois qui protègent la vie humaine dès la
conception (c'est un précepte constitutionnel) ne sont pas
respectées ; nous avons emprunté le chemin tracé par
l'excellent travail que d'autres entités de la ville de Cordoba comme
“Portail de Bethléem” et “Femmes pour la Vie” ont
effectué sur ce point spécifique. Il faudrait aussi mentionner
tout ce font tant d'organisations pro-vie dans tout le
pays.
P.C.I. : A propos,
comment ces autres entités pro-vie ont-elles perçu l'affaire
?
P.F.A. : Très bien.
Dès que la nouvelle de la «mesure préventive»
décidée par la magistrate a été rendue publique, on
a reçu plus de 200 e-mails (d’associations et de personnes
privées) pour nous soutenir et surtout pour exprimer leur joie au sujet
du courage et de l'intégrité de la
juge.
Je dois tout
particulièrement remercier le Dr Jorge Scala pour ses conseils et la
documentation envoyée lors de son précédent procès,
«Portail de Bethléem contre Ministère de la
Santé», jugement qui nous a servi de
modèle.
P.C.I. :
Vous êtes un prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie
X...
P.F.A. : Oui, tout comme
les Pères Sebastian de Candido et Claudio Formica qui sont avec moi dans
l'association.
P.C.I. :
Vous êtes les fameux
«lefèbvristes»...
P.F.A.
: Les mal-nommés «lefèbvristes». Nous sommes
simplement des prêtres catholiques, apostoliques et romains ; et nous le
sommes réellement . C’est un qualificatif
(«lefèbvristes») qu'on a voulu nous imposer et que beaucoup de
gens répètent par commodité ou par manque d'information.
Notre congrégation a été fondée par Mgr Marcel
Lefèbvre en 1970 en Suisse, avec toutes les permissions canoniques
correspondantes. Ensuite se sont succédés une série de
conflits qui ont motivé des sanctions canoniques que nous
considérons comme injustes et invalides, et qui doivent être
révisées par Rome. Une des fausses accusations typiques que l'on
nous attribue est de ne pas reconnaître le Pape Jean-Paul II ; c'est une
accusation ridicule et absurde, surtout que pendant le séminaire on doit
signer une déclaration à trois moments distincts, et ce dans les
deux années de formation, dans laquelle on manifeste expressément
que l'on reconnaît le pape Jean-Paul II comme Pape légitime de
l'Église Catholique et l'on s'engage à prier publiquement pour
lui, et on le fait ! Mais ne me sortez pas du
sujet...
P.C.I. : Ce
n'est pas que je veuille vous sortir du thème du procès. Mais il y
a des médias et des groupes qui disent maintenant que tout ceci est
affaire de lefèbvristes «qui sont à bannir». Ainsi,
l'association féministe Rima a fait circuler un e-mail les accusant d'une
montagne de choses.
P.F.A. :Cela signifie qu'ils sont affectés par le recours et qu'ils craignent
les conséquences possibles du procès ; vous devez savoir ce qu'ils
ont dit de madame le Juge, qu’ils ne peuvent pas accuser d'être
«lefèbvriste» ; ils l'ont décrite comme
rétrograde, discriminatrice et ont déversé une tonne de
calomnies que je ne veux pas
répéter.
C'est leur mode
d'action : la calomnie, la pression médiatique, le happenning de
«dénonciation» publique. Vous avez peut-être vu à
la télévision la micro-manifestation de mise au pilori faite
aujourd'hui même contre elle. Combien de gens y avait-il
?
Il paraît qu'ils n'était
même pas cent. Ils ne ressemblaient à rien, comme ces
prétendus «Catholiques pour le droit de choisir» : les femmes
de cette organisation ne sont pas catholiques ou, si elles le sont par le
baptême, elles l'ont renié parce qu'elles promeuvent toutes une
série de perversion contraires à la morale naturelle et à
la morale catholique. Elles, elles ont toute la presse de leur
coté.
P.C.I. :
J'ai noté que de façon répétée vous avez
demandé à la presse qu'elle soit objective. Avez-vous
été si mal traité
?
P.F.A. : Par beaucoup de
gens, oui, même de manière grossière et obscène.
D'autres ont déformé le sujet, et je dois penser qu'ils l'ont fait
de manière délibérée, disant que je faisais des
procès pour telle ou telle chose qui n'avait rien à voir. Je crois
que beaucoup cherchent à semer la confusion dans l'esprit des gens. Et on
ne publie pas les démentis qu'on essaye de faire contre les fausses
accusations.
P.C.I. : Et
contre qui êtes-vous en train d'agir en justice
?
P.F.A. : Le défendeur
est le Ministère de la Santé de la Nation qui permet la
circulation des drogues abortives et du stérilet, qui est aussi
abortif.
Même si la liste des
drogues abortives est très longue, je voudrais répéter le
nom de sept médicaments autorisés par le Ministère qui
admet, dans ses prospectus, l'effet abortif qui «empêche la
nidation».
Ce sont :
l'«Exluton», du laboratoire Organon ; le «Norgestrel Plus»,
du laboratoire BiotenK ; le «Cilest», de Janssen-Cilag ; et quatre
autres appartenant au laboratoire Wyeth : «Trinordiol»,
«Harmonet», «Minulet» et «Minesse». Mais le
procès ne se base pas sur les marques commerciales, mais sur les drogues
qu’elles utilisent ; c'est pourquoi, une fois qu'est
démontré l'effet abortif avec un produit, tous ceux qui utilisent
la même drogue tombent sous le même verdict. En plus de ceux
déjà nommés, il existe encore aujourd'hui deux produits de
plus qui sont mis sur le marché en tant que «contraceptifs
d'urgence».
Une fois
décodé, cela signifie «avec effets abortifs potentiels»,
puisque les drogues sont les mêmes, sauf que dans les contraceptifs
d'urgence il y a une surdose et qu’on modifie la façon de les
prendre pour donner de la puissance aux effets abortifs (par exemple, le
lévonorgestel, au lieu de mettre 10 doses dans chaque pilule, on en met
90 de cette substance) ; et tout ceci en dépit de ce qu'avait
statué la Cour Suprême contre l'«Imediat», du laboratoire
Gador. Enfin : «les deux abortifs potentiels» qui circulent dans notre
pays sont : l'«Imediat-N» (successeur du «Imediat» interdit)
et le «Norgestel Max».
Jamais
ceux-ci ni les sept premiers médicaments n'auraient pu être
autorisés avec les lois que l'on a ; il serait intéressant qu'un
avocat pénaliste étudie les possible responsabilités
pénales pour déposer une plainte contre ces fonctionnaires ; et
aussi du coté des «consommatrices» qui ont consommé des
abortifs sans que les laboratoires les préviennent, ce qui est
très déloyal et malhonnête de la part des
fabricants.
P.C.I. :
Beaucoup de ces médicaments sont abortifs, parce qu'ils empêchent
la nidation de l'ovule fécondé, comme ils finissent par l'admettre
et que vous aussi l'avez dit. D'autres cependant ne sont pas toujours
abortifs...
P.F.A. : Les
effets abortifs, et je dis «les» parce qu'il y en a plusieurs, sont
toujours présents parce qu'ils ne sont pas dissociables des effets
contraceptifs (par exemple l'effet
anti-ovulatoire).
Ce qui peut arriver,
c'est qu'on n'a pas toujours un avortement, mais que parfois ils empêchent
la conception. Mais, en tant qu’avocat plaidant cette cause, je vous dit
que s'il y a un risque que le produit soit abortif, même s'il ne l'est pas
toujours, par ce seul fait on devrait en interdire la fabrication et la
vente.
On ne peut pas se dire «il y
a risque d'avortement... et continuer à vendre», non ! Ou il n'y a
aucun risque d'avortement, ou s'il y en a, on doit interdire : in dubio pro
vita.
Que se passe-t-il, par exemple,
avec d'autres médicaments dangereux ? On les vend, sous réserve
d’inscription au registre, en renouvellement, et par stricte prescription
médicale. Ces contraceptifs se vendent librement comme si c'était
de l'aspirine.
C'est pourquoi nous avons
demandé une mesure de protection, prévenant d'un danger imminent
pour la santé des femmes et spécialement pour la vie des enfants
juste conçus. Si le zygote, l'ovule fécondé, ne s'implante
pas ou ne se nide pas dans l'endomètre, la grossesse ne peut pas
prospérer et il se produit un avortement. Ainsi, si le zygote ne
s'implante pas, l'enfant conçu
meurt.
Le stérilet, qui n'est pas
une drogue, est encore plus abortif, on peut le dire, parce que par d'autres
mécanismes, il accentue l'effet d'éviter l'implantation
(même s'il a aussi d'autres effets abortifs), et en plus parce qu'il ne
s'occupe pas d'essayer d'éviter l'ovulation : une femme qui a un
stérilet ovule normalement. De quel effet «contraceptif» de
non-ovulation nous parle-t-on
?
P.C.I. : Et que se
passe-t-il avec les méthodes contraceptives non abortives
?
P.F.A. : Les contraceptifs
non abortifs ne font pas partie de ce procès. Mais en tant que
prêtre j'ai le devoir de rappeler que la contraception est contraire
à la morale naturelle et à la morale catholique parce qu'elle va
à l'encontre de la fin première du mariage, qui est la
perpétuation de l'espèce (la procréation), le
«croissez et multipliez» du commandement divin. Même si une
contraception n’est pas abortive, elle est immorale, et
péché mortel, que l'on utilise un préservatif ou autre
chose.
Ce qui est dommage, et qui doit
aussi être dit, c'est que beaucoup de prêtres disent à leur
fidèles qu'utiliser un préservatif n'est pas pécher alors
que c'est faux, et ils devront en rendre compte devant
Dieu.
P.C.I. : Mais Pie
XII acceptait les méthodes
naturelles.
P.F.A. : Oui, mais
en les assortissant de conditions très strictes, et non pas comme un
«contraceptif catholique», comme cela a malheureusement
été le cas, pendant des décennies, et comme cela continue
de l'être aujourd'hui.
Certains
pensent que tant que l'on utilise la méthode naturelle, il existe une
liberté totale : nous devons leur répondre ce qu'avait
déjà dit Pie XII : utiliser la méthode naturelle hors des
circonstances graves qui l'autorisent est
péché.
Pourquoi croyez-vous
que les familles qui en avaient 5, 6, ou encore beaucoup plus d'enfants, ces
familles catholiques sont devenues des cas rares
?
Parce que l'on a détourné
une chose licite dans les cas exceptionnels pour la convertir en norme. Ensuite
est venue la génération des Catholiques qui ont reçu
l'absolution des prêtres pour l'usage des contraceptifs qui sont
aujourd'hui à l'ordre du jour. Absolution et même recommandation.
Il y a maintenant des groupes dits catholiques et même des prêtres
et des évêques qui remettent ouvertement en question la morale
catholique.
Dans l'actualité, nous
avons une Europe dépeuplée, qui donne des incitations pour que les
familles aient des enfants, car sinon leurs systèmes de production et de
prévoyance plongent. Nous avons l'exemple du communisme, qui est
intrinsèquement opposé au catholicisme, et cependant, dans cette
même Russie on a dû revoir cette politique de contraception à
cause des dommages causés au
régime.
P.C.I. :
Dans notre journal nous avons beaucoup parlé de ce thème. Vous
devez avoir lu les déclarations du président Chirac invitant les
Français a avoir au moins trois enfants par famille. Il invite à
avoir une «vision reproductive» de
l'amour...
P.F.A. : Oui, on
m'en a parlé. Cela démontre qu'un des plus grands fléaux
qui puissent être infligés à une nation est d'attaquer sa
natalité. Chirac est un libéral. Il ne dit pas cela en tant que
Catholique.
Les problèmes de
pauvreté n'ont pas pour cause la natalité. Au contraire. Les
nations les plus peuplées sont celles qui ont les plus gros
marchés internes et les meilleurs systèmes de prévoyance.
Une des plus grandes richesses de n'importe quel pays est sa population. Mais
regardez, c’est secondaire quand on pense que les contraceptifs tuent des
personnes innocentes en les privant de vie, le plus grand bien naturel, et de la
vision béatifique au Ciel, le plus grand bien surnaturel, étant
donné qu'on les tue sans même leur donner l'opportunité de
recevoir le baptême, et c'est pour ça qu'ils vont au «Limbes
des Enfants». C'est un crime sans nom. Mais lorsqu’on on me sert des
arguments économiques, je réponds avec des arguments
économiques. «Diminuer la population signifie augmenter la
pauvreté.»
P.C.I.
: Et que fait-on avec les pauvres
?
P.F.A. : Et quel bien leur
fait-on en tuant leurs enfants ? Il faut aider les pauvres par la charité
chrétienne, avec des oeuvres de miséricorde en promouvant
l'éducation dans les vertus naturelles et
surnaturelles.
C'est comme ça
qu'on améliore la société. Et avec des politiques de
justice, de promotion et de protection de la famille menées par
l'État. Mais pour cela il n'y a jamais d'argent ; en revanche, pour les
campagnes de contraception, il y a toujours de l'argent. C'est une honte que
dans un pays comme l'Argentine, on meure de
faim.
On nous rétorque le manque
de fonds, et cependant il y a assez dans le budget pour dépenser des
millions en contraceptifs-abortifs.
Pour
le mal, il y a toujours de l'argent. Pour le détournement de fonds
publics, pour les scandales et les pots de vin, il y a toujours de l'argent. Si
les montants astronomiques de la corruption du système
démocratique, tels qu’ils sont estimés par les journalistes,
si ces fonds étaient utilisés pour créer des industries,
des emplois, etc. jusqu'où pourrait-on éviter la pauvreté
?
Dans notre pays le patriotisme n'existe
pas, il n'y a que l'intérêt privé et mesquin de s'enrichir
par le biais du secteur public. Et même dans ce contexte social il y a
toujours de l'argent pour la contraception. Cela ne vous paraît-il pas
étrange ?
Il est évident
qu'on ne veut pas protéger la famille mais la
détruire.
P.C.I.
: Le Pape parle en permanence de la «culture de mort»,
contre l'avortement, de défendre la famille. J'imagine qu’il est
content de ce que vous avez fait. Est-il au courant
?
P.F.A. : Nous n'avons pas
d'information officielle quant à ce qu’il sait de notre
procès, même si nous supposons qu'il se réjouira beaucoup
quand il saura. Nous avons informé la nonciature apostolique en
Argentine, qui est la plus haute représentation du Saint-Siège
dans le pays ; et les Archevêques et évêques d'Argentine. On
leur a envoyé les écritures juridiques, il y a trois mois quand le
procès a été lancé et que la presse ne pouvait pas
imaginer ce qui allait
arriver.
P.C.I. : Vous
n'avez pas eu de réponse
?
P.F.A. : Pas à ma
connaissance. Sachez qu'en plus de la nonciature Papale, on a aussi
prévenu l'Évêque de La Plata et Mgr Giaquinta de la
décision de la juge qui interdit la fabrication et la vente de tous les
contraceptifs et stérilets à cause de leurs effets
abortifs.
P.C.I. : Pour
finir, Père, il est évident que le nom de la fondation fait
référence à la fête de l'Incarnation de notre
Seigneur, qui est aussi le Jour de l'Enfant à
Naître...
P.F.A. : Oui,
et en plus, cette date a une signification particulière pour nous-autres
membres de la Fraternité Saint Pie X. C'est la date de la mort de notre
fondateur. Et croyez-moi, pour moi ce n'est pas un hasard ; je suis convaincu
que Dieu l'a voulu ainsi pour un dessein très spécial et nous
aimons cette
«coïncidence».
Mais,
strictement parlant, nous avons donné ce nom à l'association en
référence à la conception du Verbe de Dieu, notre seigneur
Jésus-Christ.